vendredi 13 juillet 2012

La circoncision ou l’Alliance des mots…


Genèse 17.9-11

Dieu dit à Abraham : Toi, tu garderas mon alliance, toi et tes descendants après toi, dans toutes leurs générations.
Voici comment vous garderez l’alliance que je traite avec vous et avec ta descendance après toi : tout mâle parmi vous sera circoncis.
Vous vous circoncirez comme signe d’alliance entre vous et moi.


Cette parole de l’Eternel, adressée à Abraham, ordonne à ce dernier d’observer le rite de la circoncision pour lui et son clan, puis pour toutes les générations qui viendront après lui, comme le signe de son appartenance à l’Alliance établie par l’Eternel avec Abraham.

Depuis lors, cette prescription s’est perpétuée et il ne viendrait à l’esprit de personne de censé, de remettre en cause cette pratique ancestrale. Et pourtant…

Il y a quelques jours, un tribunal de Cologne (en Allemagne) a déclaré la circoncision illégale[1]. Des juges ont estimé que cette pratique était contraire à l’intérêt de l’enfant et portait atteinte à son intégrité physique, estimant par ailleurs qu’elle constituerait un obstacle à son libre arbitre en matière de religion, n’étant pas, vu son jeune âge, en mesure de faire un choix en toute liberté. Les magistrats sont allés jusqu’à demander que la circoncision ne soit autorisée qu’avec le consentement de l’individu (est-ce à dire à sa majorité ?).

Cette décision qui pourrait faire jurisprudence provoque de nombreuses réactions, aussi bien parmi les Musulmans que parmi les Juifs. Déjà plusieurs médecins ont refusé de pratiquer la circoncision par crainte d’être poursuivis en justice. Le monde chrétien ne s’est pour l’instant pas prononcé, du moins n’en n’ai-je pas eu l’écho… en Allemagne. Imaginons seulement qu’une mesure semblable soit prise en France. Assisterions-nous au même mutisme ?... Pour l’heure, seuls les rabbins en Europe et les autorités musulmanes tentent de réagir pour s’opposer à cette décision de justice.

Il convient à ce stade de relever que dans l’histoire, nombreux ont été les régimes à prendre des mesures semblables pour s’opposer frontalement à des minorités, notamment les Juifs. C’est ainsi que les Romains, à certaines périodes, ou encore l’église catholique à ses heures les plus noires, ont cherché à empêcher ou limiter les pratiques telles la circoncision, les fêtes ou le Chabbat. Sans préjuger des motivations des juges du tribunal de Cologne, il me semble difficile d’imaginer que ces magistrats n’aient pas réalisé que leur décision d’interdire la circoncision (à caractère religieux, la prescription médicale reste autorisée) portait atteinte aux racines mêmes des religions juives et musulmanes. Que va-t-on faire ensuite ?... Arrêter et condamner les médecins et rabbins circonciseurs ?... Mettre à l’amende les parents transgresseurs de la loi, coupables « d’actes de barbarie » sur leurs propres enfants ?...

Même si la circoncision a été ces dernières décennies l’objet d’avis les plus divers dans le monde médical, aux Etats-Unis, pour ne citer que cet exemple, la majorité des jeunes garçons sont circoncis pour des raisons d’hygiène.

Pour aller plus loin, il n’est pas inutile de rappeler ici que la circoncision – Brit Milah en hébreu – signifie littéralement l’Alliance de la coupure, ce qui peut aisément se comprendre. Mais il apparait significatif que le terme Milah en hébreu signifie également « mot ». En d’autres termes, l’Alliance de la coupure peut aussi se traduire par l’Alliance du mot, ou par extension des mots.

La coupure exercée sur l’excroissance de l’organe génital masculin a aussi valeur de symbole pour signifier que l’Alliance divine doit être transmise de génération en génération. Le jeune garçon, puis l’homme, toute sa vie, doit se souvenir de l’héritage qu’il a reçu et qu’il est appelé lui-même à transmettre. Toute la pensée et la tradition juives s’inscrivent dans la notion fondamentale de la transmission.

Pour le peuple juif, il ne s’agit pas d’une option, pas même d’un choix de vie ou de foi, mais d’une responsabilité individuelle et collective de transmettre les bases de l’Alliance établie par l’Eternel avec Abraham le patriarche.

La foi est bien entendu une affaire personnelle qui sera l’objet d’un choix ultérieur quand l’individu sera en âge de comprendre et de décider. Mais la circoncision inscrite dans sa chair est comme une invitation permanente à se rattacher à la foi d’Abraham et à garder l’Alliance de Dieu, et même à la transmettre ensuite à la génération future.

Le témoignage par la coupure dans la chair invite au témoignage par les mots sortants de la bouche car, en définitive, la circoncision ne s’arrête pas à un acte chirurgical. La foi exprimée par des mots n’est autre que l’expression d’une circoncision du cœur (Jérémie 4.4), celle que tous les prophètes appellent de leurs vœux. Les apôtres ne se lassent pas de répéter le lien entre la foi d’Abraham, la circoncision du cœur et la circoncision dans la chair (Romains 2.25 et suivants ; Romains 3.1 ; 4.11 et suivants). Et le plus important est bien entendu l’obéissance à la foi, la circoncision du cœur.

Mais parce que Dieu fait preuve de pédagogie et même de psychologie, la circoncision dans la chair est depuis des millénaires un signe de l’Alliance divine, une invitation à la foi. Celui qui s’y soustrait, ou plus exactement qui s’y refuse pour ses enfants, rompt en quelque sorte l’Alliance de la transmission à laquelle il est lié par son ascendance. Genèse 17.14 le déclare coupable.

Je ne sais pas ce qui résultera des démarches en cours pour s’opposer à la décision scandaleuse de ce tribunal de Cologne, mais il est clair qu’elle est de nature spirituelle et s’oppose, au-delà des rites et traditions juives (et musulmanes en l’occurrence), à Dieu lui-même.

Le monde chrétien pour l’instant se tait, pour combien de temps…

Guy ATHIA


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